lundi 14 février 2011

La pertinence des méthodes...

"Le moyen le plus propre, le plus aisé, le plus court, le plus utile pour aimer Dieu de tout ton cœur… c'est d'aimer Dieu de tout son cœur…

Plusieurs aussi bien que vous me demandent des méthodes, des moyens, des secrets de perfection ; et je leur réponds que je ne sais point de plus grande finesse que d'aimer Dieu de tout son cœur… Et tout le secret d'arriver à cet amour, c'est d'aimer ; car comme on apprend à étudier en étudiant, à parler en parlant, à courir en courant, à travailler en travaillant, aussi apprend-on à aimer Dieu et le prochain en l'aimant ; et ceux qui prennent une autre méthode se trompent."
- Oeuvres complètes de Saint François de Sales, évêque et prince de Genève, Docteur de l'Eglise, Volume 1
La voie bouddhiste est souvent décrite comme la culture des trois éducations[1], l'éthique, la concentration et la lucidité. Chacune de ses qualités s'acquièrent en les cultivant de façon plutôt directe. Les cinq préceptes se perfectionnent en les suivant sans détour et sans astuces. Au contraire, les astuces risquent d'être contreproductives et de nous retenir dans une approche magique. La concentration se cultive par une observation attentive et vigilante. Il n'y a guère d'autre méthode. La lucidité s'acquiert en raisonnant clairement. Et cela est vrai pour toutes les qualités à perfectionner (S. pāramitā).

Patrul Rinpoché aimait raconter des anecdotes et par reconnaissance, les tibétains aiment raconter des anecdotes sur un Patrul Rinpoché espiègle.

Dans une des anecdotes, Patrul Rinpoché entendait parler d'un grand ermite qui avait passé vingt ans à cultiver la perfection de la patience dans une grotte et il comptait le mettre à l'épreuve. Il allait vers sa grotte, passait sa tête dans l'entrée et criait
- Salut, qu'est-ce que tu fais là ?
Dérangé par cette interpellation impertinente, l'ermite ouvrit un œil et demanda
- Qu'est-ce que tu veux ?
Patrul Rinpoché se tint alors accroupi face à lui les yeux brillants de malice sans mot dire. L'ermite lui demanda alors
- Qui es-tu ? D'où tu viens ?
- Je viens de derrière et je vais dans la direction à laquelle je fais face.
Imperturbé, l'ermite continua à l'interroger
- Où es-tu né ?"
- Sur la terre ?
L'ermite commença à s'impatienter.
- C'est ça, c'est ça, que me veux-tu exactement ?
- Eh bien, j'aimerais savoir ce que tu fais ici ?
L'ermite comptait impressionner ce nigaud par son ascèse
- Je cultive la perfection de la patience enseignée par le Bouddha et cela depuis vingt ans.
Patrul Rinpoché s'éclata de rire et lui lança d'un air complice
- C'est pas mal du tout comme plan ! Et ça marche bien ici ? Combien cela te rapporte en moyenne ?
- Comment oses-tu insinuer cela ? Tu rentres chez moi à l'improviste, tu sors des insanités et en plus tu m'insultes ! Sors d'ici !
Sur le point de partir, Patrul Rinpoché lui dit simplement
- Et où elle est maintenant ta perfection de la patience ?
Le visage de l'ermite se figea instantanément car il se rendit compte qu'il venait de perdre toute crédibilité.

***

Il y a plusieurs version de cette anecdote, celle utilisée pour la traduction française se trouve ici.

[1] On les appelle "La triple éducation supérieure" (T. lhag pa'i bslabs pa gsum), "les trois agrégats" (P. trisikkhā = khandha) ou encore "les trois beautés" dans le bouddhisme cambodgien.

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