lundi 27 décembre 2010

Hugues de Saint Victor (Emile Bréhier)



Ce qui intéresse Hugues de Saint-Victor, c’est d’ailleurs moins l’accroissement que l’approfondissement des connaissances qui, à leur sommet, touchent à Dieu : on commence par penser : la cogitatio, « c’est le contact passager avec les choses, lorsqu’une chose se présente tout à coup à l’âme par son image, qu’elle pénètre par les sens ou surgisse de la mémoire » ; puis on médite sur elles ; « la méditation, c’est le maniement continuel et sagace d’une pensée qui s’efforce de débrouiller ce qui est embrouillé et de pénétrer ce qui est caché » ; enfin l’on contemple ; « la contemplation, c’est une intuition (contuitus) de l’âme pénétrante et libre, qui se répand sur toutes les faces de l’objet à voir » : cette contemplation, qui commence à la créature, va jusqu’au créateur [479]. On voit que ce qui donne à la pensée d’Hugues sa tension et sa vie, c’est une direction p192 qui n’est jamais perdue de vue et dont sa doctrine consiste surtout à marquer les étapes.

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Sa méthode est pourtant différente de celle de saint Anselme par le rôle qu’il assigne à l’« expérience ». Il a sur ce point des déclarations de principe formelles : « tout progrès du raisonnement prend son point de départ en ce que nous connaissons par expérience », ou encore : « c’est par les choses connues par expérience que nous devons conclure par raisonnement ce qu’il nous faut penser des choses qui sont au-dessus de l’expérience [482] ». Toutefois il faut se rappeler que ces formules ne sont dites qu’à propos des recherches sur Dieu et ne font qu’énoncer sous une autre forme le fameux adage paulinien : per visibilia ad invisibilia ; et, en l’espèce, l’expérience dont il s’agit se borne au spectacle de la génération p193 et de la corruption continuelles que « ne nous permet pas d’ignorer l’expérience quotidienne ». Partant de là, Richard conclut qu’il doit y avoir un être qui existe par lui-même et qui, partant, est dès l’éternité. « Sinon il y a eu un moment où rien n’était ; et alors aucune des choses qui devaient venir ne serait venue, puisqu’il n’y aurait rien eu qui leur eût donné ou eût pu leur donner le principe de son existence [483]. » Dans cette preuve de l’existence de Dieu, si différente de celle de saint Anselme, on voit qu’il s’agit de l’expérience en général, telle que l’avait définie Aristote ; car le fond de la preuve consiste bien dans l’application du célèbre adage aristotélicien : « il est impossible qu’une chose en puissance passe d’elle-même à l’acte [484] ».
Ce rôle donné à l’expérience paraît naître, chez Richard, du désir, qui lui est commun avec Hugues, de placer, dans une progression unique, tous les degrés de connaissance jusqu’à la vision de Dieu, comme il le fait dans le De gratia contemplationis [485]. Dans la progression à trois termes (imaginatio, ratio, intelligentia) qu’il y indique, le premier et le troisième impliquent la présence de leur objet ; mais l’imagination connaît la présence d’un corps, et l’intelligence la présence d’une essence intelligible ; entre elles deux, la raison connaît les choses absentes et cachées au moyen de ce qui est présent ; elle connaît, par exemple, la cause par ses effets. Tandis que la raison a toujours besoin de l’appui du sensible, l’intelligence, atteignant directement son objet, peut se passer des sens et de la raison à condition d’entendre « la simple intelligence sans l’office de la raison, et la pure intelligence sans le concours de l’imagination ». Au sommet de l’intelligence est la contemplation qui dépasse l’intelligible ou essence p194 pour arriver à l’intellectible ou Dieu ; et l’on y distingue encore trois degrés selon que l’on est plus ou moins près du modèle : la dilatation de l’esprit (dilatatio mentis), lorsque l’on voit Dieu en figure, l’élévation de l’esprit (sublevatio mentis), lorsqu’on le voit comme en un miroir, l’aliénation de l’esprit (alienatio mentis) « lorsqu’on le contemple en sa simple vérité ». Cette contemplation a pour condition la pureté du cœur ; car le « miroir » en lequel on voit Dieu, c’est l’âme même, et c’est « par la connaissance de soi qu’on monte à la connaissance de Dieu » ; il faut donc que ce miroir soit pur ; mais cette préparation n’aboutit pas d’elle-même à l’état suprême d’aliénation que l’âme doit atteindre et qui ne peut venir d’elle. Toujours d’ailleurs, remarquons-le, d’un bout à l’autre de la chaîne, le degré supérieur ne provient jamais de l’inférieur, mais s’ajoute à lui comme quelque chose qui le dépasse.

[Extrait de La philosophie du Moyen âge, p. 170-171]

***

[482] VI, t. CXCVI, p. 894-895.
[483] Ibid., 894.
[484] Richard paraît s’y référer (VI, t. CXCVI, p. 894-b) : « Nous voyons que les choses qui n’étaient pas auparavant passent à l’acte. »
[485] Cf. M. LENGLART, CXIII, ch. II et III.

Approche graduelle de l'inconditionné



On ne peut pas souligner assez l'importance capitale des "Cinq traités de Maitreya" sur l'approche de la Mahāmudrā de Maitrīpa. Le maître Asaṅga (4ème siècle) qui est à l'origine de l'école Vijñānavāda (Yogācāra) était un adepte de Maitreya et/ou un disciple de Maitreya-nātha[1]. C'est à Maitreya que sont attribués des traités au nombre de cinq que l'on appelle communément " Les cinq traités de Maitreya (lien pour télécharger la version tibétaine) "[2] :
1. L'ornement de l'intuition directe (S. Abhisamayalaṅkara T. mngon par rtogs pa'i rgyan)
2. L'ornement des sūtra du Grand véhicule (S. Mahāyāna-sūtralaṅkara T. theg pa chen po mdo sde'i rgyan)
3. La discrimination entre le Milieu et les extrêmes (S. Madhyānta-vibhaṅga T. dbus dang mtha' rnam par 'byed pa)
4. La discrimination entre les attributs et la substance des attributs (S. Dharma-dharmatā-vibhaṅga T. chos dang chos nyid rnam par 'byed pa)
5. Le traité mahāyāna de la continuité insurpassable (S. Mahāyanottaratantra-śastra ou encore Ratnagotravibhāga T. theg pa chen po rgyud bla ma'i bsten chos)
Les deux derniers traités, qui étaient perdus ou tombés en désuétude en Inde pendant une assez longue période[3], avaient été rédecouverts par Maitrīpa (978-1053) dans un stūpa "d’où émanait de la lumière à travers une crevasse"[4]. Après leur découverte, Maitreya est apparu à Maitrīpa et lui a enseigné les deux textes. Cette redecouverte heureuse serait la raison même pour le fait qu’Advayavajra aurait été appelé "Maitrī-pa".

Un des cinq traités et un des deux retrouvés par Maitrīpa enseigne quatre pratiques (T. sbyor ba S. prayoga ?) qui donnent graduellement accès à l'intuition (S. jñāna) de l'inconditionné. Le traité en question est la Discrimination entre les attributs et la substance des attributs (S. Dharma-dharmatā-vibhaṅga). La progression y est enseignée de la façon suivante :
1. Pratique en s'appuyant sur un objet
2. Pratique sans s'appuyer sur un objet
3. Pratique sans s'appuyer sur un sujet
4. Pratique s'appuyant sur l'absence d'appui[5].
Cette progression en quatre étapes est précisée dans La discrimination entre le Milieu et les extrêmes (S. Madhyānta-vibhaṅga) dans un passage que cite le troisième Karmapa dans ses Instructions sur l'union Mahāmudrā/Sahaja yoga[6]
"C'est en s'appuyant sur un objet (S. ālambana[7])
Que l'absence d'appui se développe le mieux[8].
En s'appuyant sur l'absence d'appui
L'absence d'appui se développe le mieux
De ce fait, c'est l'absence d'appui qui accomplit l'essentiel.
Ainsi, il faut savoir que l'appui et
L'absence d'appui sont identiques par nature.
"

C'est ce qui est écrit dans le Madhyānta Vibhanga. Ainsi, afin de contrôler la conscience, [59] on la recueille sur, par exemple, la forme d'un objet et quand les six consciences (5 sensorielles plus la mentale) convergent sur un seul objet, la pensée qui se porte sur d'autres objets, s'apaise entièrement (S. upaśama). De cette manière, [l'objet] est en relation avec l'inconditionné. Ce support d'attention (T. dmigs pa) que constituent les six objets [sensoriels et mental] est naturellement lucide et vide, si on le contemple passivement (T. yid la mi byed par S. amaniskāra). Et sans produire des caractéristiques de dissentiment ou d'antidotes, ni produire quelque concept que ce soit, on fixe l'espace en face de nous de nos deux yeux. Sans bouger le corps, le souffle va et vient et l'on reste à l'aise et détendu. On ne dit mot."
Une telle progression n'était pas totalement inconnue en occident. Prenons par exemple la méthode "cogitationis" et "meditationis" de Hugues de Saint-Victor : "Tout d'abord envisager avec une attention résolue un objet précis de pensée : puis, l'esprit se libère de ce sujet en le dépassant ; là-dessus, s'élève chez Hugues la "contemplation" dans laquelle survient l'Esprit lui-même, qui enseigne ce qu'on ne pense plus, qu'on n'invente plus, auquel on ne réfléchit plus soi-même mais qui est pensé en nous."[9]

***

Illustration : Maitreya, Asaṅga et Vasubandhu

[1] Maitreya ou Matreyanātha. Pseudonyme du maître (vers 270-350) d’Asanga qui aurait été le fondateur de l’école du Yogācāra. CDI p705 ou Ruegg p 36
[2] S. panca maitreyograntha T. byams chos sde lnga
[3] Ni le RGV ni le DhDhV ne figurent dans le lDan dkar ma, le catalogue des textes conservés au début du Ixème siècle au palais royal tibétain de sTong Thang ldan kar, alors que les autres 3 traités y sont. Ruegg p 39
[4] NAUDOU p176/ DT p422; AB p 347 Ruegg met en doute que ce soit le cas, et fait peser la présomption de partialité sur Gos lotsava Ruegg p. 36. Voir aussi pp. 38-39 sur l'absence effective des deux textes.
[5] 1. dmigs pa yi ni sbyor ba dang 2. mi dmigs pa yi sbyor ba dang 3. dmigs pa mi dmigs sbyor ba dang 4. mi dmigs dmigs pa'i sbyor ba'o. Jim Scott p. 146
[6] phyag rgya chen po lhan cig skyes sbyor gyi khrid yig. Karma rang byung rdo rje'i gsungs 'bum Vol. 11 pp. 53-72. Le Karmapa, dans son raisonnement, suit le commentaire de Vasubandhu, Trisvabhāva-nirdeśa.
[7] alambana = arammana = objet sensoriel, y compris mental, donc aussi référence
[8] sens incertain : dmigs pa la ni brten nas su//mi dmigs pa la rab tu skye//
[9] Rudolf Otto, Mystique d'Orient et mystique d'Occident p.250

Texte Tibétain Wylie (citation de Karmapa 3)

he badz+ra las kyang*/chags pas 'jig rten 'ching 'gyur na//'dod chags nyid kyis rnam grol 'gyur//zhes gsungs pas thabs mkhas pa yang de nyid yin la/
dmigs pa la ni brten nas su//
mi dmigs pa la rab tu skye//
mi dmigs pa la brten nas su//
mi dmigs pa ni rab tu skye//
de yi phyir na dmigs pa ni//
mi dmigs ngo bo nyid du grub//
de lta bas na dmigs pa dang*//
mi dmigs mnyam par shes par bya//
zhes dbus dang mtha' rnam par 'byed pa las gsungs pas/dang po sems 'dzin pa la/yul gzugs lta bu gcig la bsdus pas/tshogs drug gcig tu bsdu bar byed pas yul gzhan la dmigs pa'i sems nye bar zhi bar skye'o//de brten na chos 'dus ma byas pa dang 'brel ba/yul drug dmigs pa'i rten de yang yid la mi byed par rang lugs su snang ba dang stong pa dang*/spang bya dang*/gnyen po'i mtshan ma med par rnam par rtog par ci yang yid la mi bya bar mdun gyi nam mkha' la mig gnyis gtad de/lus ma 'gul ba/rlung 'gro ba dang 'ong ba/rang sor dal bar bzhag nas/ngag mi smra bar bzhag ste dpal tai lo pas/sems ni nam mkha' 'dra bar bzung bar bya zhes pa dang*/

jeudi 23 décembre 2010

Traduction : Hymne au Sans-pareil



Nāgārjuna est l'auteur d'une série de quatre hymnes (S. catuḥstava) à la conscience éveillée (Buddha) qui n'ont pas été composés comme un ensemble, mais qui ont été regroupés ultérieurement. Les quatre titres que l'on trouve sous cette dénomination en sanscrit ne sont pas les mêmes que ceux que l'on trouve dans la collection canonique tibétaine. La série en sanscrit est : Nirupamastavah (T. dpe med par bstod pa), Lokātītastava (T. 'jig rten las 'das par bstod pa), Acintyastava (T. bsam gyis mi khyab par bstod pa) et Paramārtha stavah (T. don dam par bstod pa).

Dans la série tibétaine, on trouve à la place de l'Acintyastava, le Cittavajrastava (T. sems kyi rdo rje'i bstod pa). Louis de la Vallée-Poussin avait publié la traduction française des quatre hymnes (louanges) de la série tibétaine dans le Muséon.

Les hymnes sont un exercice particulier dans le bouddhisme. Ce genre utilise tous les aspects des hymnes anciens, védiques et autres, où l'on loue les qualités du divin. L'hymne a plusieurs fonctions. En faisant le louange des qualités du divin ou d'un dieu particulier, on accumule du "mérite" (S. puṇya) tout en prenant conscience de ses qualités qui sont accessibles à tous.

Les hymnes de Nāgārjuna contiennent des allusions au Bouddha historique et à ses actes et à son action, mais ils montrent surtout que les véritables qualités et caractéristiques du Bouddha ne se trouvent ni dans son corps, ni dans sa pensée, ni dans aucun attribut (S. dharma), mais dans la substance des attributs (S. dharmatā). En adressant des hymnes au Bouddha historique, puis au "Bouddha universel", nous sommes invités à prendre conscience du Bouddha "intérieur" et à devenir nous-même "Bouddha". Ainsi, la pratique des hymnes permet aussi bien une approche dualiste classique qu'une approche plus mystique. Notamment dans le cas des hymnes de Nāgārjuna.

Hymne au Sans -pareil

En langue indienne : nirupama-stava
En tibétain : Hymne au Sans-pareil

Hommage à Mañjuśrī kumara

1. A ceux qui sont privés de la vue [juste]
Les êtres du monde Tu t'efforces à venir en aide
Tu connais l'absence de substantialité (S. a-bhāva)
Toi qui est sans pareil je t'adresse cet hymne

2. Absolument rien
N'est vu par Ton oeil éveillé
Ta vision est insurpassable
C'est la réalité du principe manifestant (S. tattvārtha) que tu connais

3. Tu es l'essence (S. sattā) de la réalité absolue (S. pāramārtha)
Il n'y a ni quelqu'un qui accède ni quelque chose qui est accédée
Mais merveille, ce qui est extrêmement difficile à accéder
La substance des attributs (S. dharmatā) est accédée par les éveillés

4. Tu n'as généré le moindre attribut (S. dharma)
Ni n'en as tu détruit
C'est par la vision de l'égalité foncière (S. samatā)
Que Tu as trouvé l'état insurpassable

5. Ce n'est pas en t'abstenant de l'Errance (S. saṃsāra)
Que tu as désiré la Quiétude (S. nirvāṇa)
Mais c'est en ne t'appuyant (S. ālambana) pas sur l'Errance
Que tu as accédé à la Quiétude, ô Seigneur (S. nātha)

6. Tu te délectes pareillement des affects (S. saṃkleśa) et
De la purification (S. vyavadāna)
Qui sont indissociables dans l'élément des attributs (S. dharmadhātu)
Et totalement authentiques

7. Toi qui es le premier (S. śreṣṭha)
Tu n'as pas dit une seule lettre
Et pourtant tous les êtres à convertir
Sont continuellement satisfaits par une pluie d'instructions (S. dharma)

8. Tu as un Esprit qui est semblable à l'espace
Les (cinq) groupes d'appropriation (S. skandha), les éléments (S. dhātu), les domaines sensoriels (S. āyatana)
Tu ne t'y attaches pas
Tu ne t'appuies sur aucun attribut (S. dharma)

9. Seigneur tu n'as pas de notion d'êtres vivants
Ni appliques-tu aucune autre notion
Mais envers les êtres qui éprouvent des peines
Tu témoignes de la compassion

10. Bonheur et souffrance,
Permanence et impermanence etc. Toi qui est le premier
Des diverses imaginations de ce genre
Ne trouvent pas d'attache dans ton Esprit

11. Aucun attribut n'arrive de nulle part et ne va nulle part
Ainsi (S. tathā-) en va-t-il de Ton propre passage (S. gata)
Ni les [attributs] se regroupent-ils ailleurs
C'est pourquoi Ta connaissance (S. saṁvedya) est ultime

12. Bien que Tu sois impliqué (T. rjes su zhugs) en tout
Tu n'es apparu de nulle part
Ta naissance, ton Dharma et Tes Corps
Sont d'autant plus inconcevables ô grand Muni

13. Ni identiques, ni différents
Les êtres tels l'écho
Sont libres de transmigration et de destruction
C'est Toi qui est sans blâme qui l'a compris

14. [L'Errance] est exempt d'éternalisme (S. śāsvata) et de nihilisme (S. uccheda)
Rien qui ne soit caractéristique (S. lakṣana) ou caractérisé (S. lakṣya) ne peut la réveler
Prince, semblable à un rêve ou à une illusion (S. māyā)
Voilà comment Tu perçois définitivement (S. vibodhati) l'Errance

15. Ce qui a les empreintes (S. vāsāna) pour fondement et pour fin
Les affects (S. kleśa) et les actes dissociatifs (S. pāpa) Tu les a délaissés
Et l'être propre des affects
Tu en fais du nectar

16. Héro (S. vīra), à travers tes formes
On perçoit l'absence de caractéristiques (S. ānimitta), et étant sans sans forme
Ton Corps qui rayonne des marques [du Bouddha]
Est cependant perçu comme un objet visuel

17. Voir comme une forme n'est pas voir
Pourtant [dans ce cas] on dit "je vois"
Voir comme un attribut est voir véritablement
La substance des attributs (S. dharmatā) n'étant pas visible

18. Ton corps n'est pas une cavité
Ni y trouve-t-on chair, os et sang
Mais c'est comme l'arc d'Indra dans le ciel
Que tu manifeste ton Corps

19. Dans ton Corps on ne trouve ni maladies, ni impuretés
Ni faim, ni soif
Mais Tu suis cependant le monde
Et manifestes même les façons du monde

20. Les défauts associés à l'obscurcissement de l'agir (S. karmāvaraṇa)
Toi qui est libre d'acte dissociatif (S. pāpa) Tu T'en abstiens
Mais en Te souciant des êtres
Tu montre cependant comment s'abstenir de l'agir

21. L'élément des attributs (S. dharmadhātu) étant indivisible
Prince (S. śreṣṭha), Tu ne distingue pas entre véhicules
Les trois véhicules que Tu as enseignés
Etaient uniquement dans l'intérêt des êtres

22. Permanent, stable et paisible
Est Ton Corps (S. kāya) qui a les attributs (S. dharmā) pour être propre
Vainqueur, c'est uniquement dans l'intérêt des êtres
Que Tu as montré la Quiétude

23. Dans les univers sans nombre
Tu meurs, Tu nais, Tu t'éveilles
Pour que ceux qui veulent se libérer de l'Errance
Et qui te vénèrent puissent Te voir

24. Seigneur, Tu est exempt de pensées/intentions (S. citta)
D'imaginations (S. vikalpa) et de mouvements (S. calati)
Pourtant dans le monde
Tu T'engages dans les actes d'un Buddha

25. Ainsi, les qualités incommensurables et inconcevables du Sugata
Je les ai décorées de fleurs ; par le mérite de cet acte
Puissent tous les êtres
Etres prêts pour recevoir les qualités (dharmā) du Muni difficiles à accéder

L'Hymne au Sans-pareil a été composé par ācārya Nāgārjuna. Il a été traduit par l'upādhyāya indien Kṛṣṇa paṇḍita et par le traducteur bhikṣu tshul khrims rgyal ba.

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Texte en tibétain Wylie


@##//rgya gar skad du/_ni ru pa ma sta baM/_
bod skad du/_dpe med par bstod pa/

'jam dpal gzhon nur gyur pa la phyag 'tshal lo//

1. gang zhig lta bas phongs pa yi//
'jig rten 'di la phan brtson khyod//
dngos po med pa'i don rig pas//
dpe med khyod la phyag 'tshal bstod//

2. gang zhig khyod kyis cung zhig kyang*//
sangs rgyas spyan gyis ma gzigs pa//
khyod kyis gzigs pa bla med de//
de nyid don ni rig pa lags|_/

don dam pa yi yod pa nyid//
rtogs dang rtogs bya mi mnga' zhing*//
e ma'o mchog tu rtogs dka' ba'i//
chos nyid sangs rgyas rnams kyis rtogs//

khyod kyis cung zhig ma bskyed cing*//
chos rnams bkag pa'ang ma lags la//
mnyam pa nyid kyi lta ba yis//
bla na med pa'i go 'phang brnyes//

'khor ba spangs par gyur pa yis//
mya ngan 'das khyod mi bzhed kyi//
'khor ba ma dmigs pa nyid kyi//
zhi de mgon po khyod kyis rtogs//

khyod kyis kun nas nyon mongs dang*//
rnam byang ro gcig gyur rig pas//
chos dbyings mngon par dbyer med pa//
kun du rnam par dag par gyur//

gtso bo khyod kyis 'ga' zhig tu//
yi ge gcig kyang ma gsungs la//
gdul bya'i 'gro ba ma lus pa//
chos kyi char gyis tshim par mdzad//

mkha' dang mnyam pa'i thugs mnga' khyod//
phung po khams dang skye mched la//
chags par gyur pa mi mnga' bas//
chos rnams kun la brten ma lags//

mgon khyod sems can 'du shes kyis//
'jug pa kun du mi mnga' yang*//
sdug bsngal gyur pa'i sems can la//
snying rje'i bdag nyid gyur pa'ang khyod//

bde dang sdug bsngal de bzhin du//
rtag mi rtag sogs la gtso khyod//
de lta'i rnam rtog sna tshogs kyis//
thugs ni chags par gyur ma lags//

chos rnams gang du 'ang 'gro 'ong med//
de bzhin khyod kyis gshegs pa'ang lags//
'ga' ru spungs pa ma mchis pa//
de phyir don dam rig pa'ang lags//

kun gyi rjes su zhugs gyur kyang*//
'ga' ru 'byung ba'ang ma lags la//
skye dang chos dang sku rnams kyang*//
thub chen khyod kyi bsam mi khyab//

gcig dang gzhan pa rnams spangs pa//
brag ca lta bu'i 'gro ba rnams//
'pho dang 'jig pa rnam spangs pa//
smad pa med pa khyod kyis rtogs//

rtag dang chad pa dang bral zhing*//
mtshan nyid mtshon bya rnam spangs par//
gtso bos rmi lam sgyu tshogs bzhin//
'khor ba nges par rtogs pa lags//

bag chags gzhir gyur mthar thug pa'i//
khyod kyis nyon mongs sdig pa spangs//
nyon mongs nyid kyi rang bzhin yang*//
khyod kyis bdud rtsi nyid du bsgrubs//

dpa' bo khyod kyis gzugs rnams kyis//
mtshan ma med mthong gzugs med bzhin//
mtshan gyis 'bar ba'i sku nyid kyang*//
gzugs su spyod yul nyid du mthong*//

gzugs su mthong bas mthong min yang*//
mthong ngo zhes ni rjod par byed//
chos mthong bas ni shin tu mthong*//
chos nyid mthong ba ma yin no//

khong stong khyod kyi sku la med//
sha dang rus pa khrag med kyang*//
nam mkha'i dbang po'i gzhu bzhin du//
khyod kyi sku ni ston par mdzad//

sku la bsnyun med mi gtsang med//
bkres dang skom pa 'byung med kyang*//
khyod ni 'jig rten rjes 'jug phyir//
'jig rten spyod pa'ang ston par mdzad//

las kyi sgrib pa'i skyon rnams ni//
sdig med khyod kyis kun spangs kyang*//
khyod kyis sems can rjes gzung phyir//
las spangs par yang rab tu bstan//

chos kyi dbyings la dbyer med phyir//
gtso bo theg _dbyer ma mchis kyang*//
khyod kyi theg pa gsum bstan pa//
sems can gzhug pa'i ched du lags//

rtag cing brten la zhi ba yi//
chos kyi rang bzhin khyod kyi sku//
rgyal bas gdul bya 'gro ba'i phyir//
khyod nyid mya ngan 'das par bstan//

grangs med 'jig rten khams rnams su//
'das dang bltams dang mngon byang chub//
'khor ba'ang thar par mos rnams kyi//
khyod la gus rnams kyis yang mthong*//

mgon po sems pa mi mnga' zhing*//
rnam rtog g.ye ba mi mnga' yang*//
khyod nyid dang gis 'jig rten la//
sangs rgyas mdzad pa'ang 'jug par 'gyur//

de ltar bde gshegs yon tan tshad med bsam mi khyab//
me tog gis brgyan pa las bsod nams gang thob par//
gyur pa 'di ni sems can ma lus pa 'di dag//
mchog tu rtogs dka' thub pa'i chos kyi snod gyur cig_/

dpe med par bstod pa slob dpon 'phags pa klu sgrub kyis mdzad pa rdzogs so///
/rgya gar gyi mkhan po kr-iSh+Na paN+Di ta dang*/_lo tsA ba dge slong tshul khrims rgyal bas bsgyur ba'o//

jeudi 16 décembre 2010

Traduction : chant de Kodrakpa



Cyrus Stearns a publié un beau petit livre avec une collection de chants de Kodrakpa Seunam Gyaltsen (ko brag pa bsod nams rgyal mtshan 1170-1249). Ce maître, natif de la région de Dingri, était dit impossible à classer dans une seule lignée. Stearns le considère comme un lama "rimé" (non sectaire) avant la lettre. Il faut préciser que le 12ème siècle et le début du 13ème siècle furent des temps non-sectaires où l'on ne pensa pas encore en termes de lignées et où il était normal de fréquenter différents maîtres avec des transmissions diverses. Geu lotsāwa, qui vivait dans une époque où la généalogie des lignées était en plein essor, est incapable de dire si Kodrakpa appartenait à la lignée Kagyupa[1].

Le maître Sakyapa Mangteu loudroup gyatso (mang thos klu sgrub rgya mtsho 1523-1596) écrit qu'il pratiqua les instructions du Dakpo Kagyu (transmission de Gampopa), de la tradition Zhama[2]) et du Chemin et le fruit (lam 'bras) de la lignée Sakyapa.[3] L'hagiographie utilisée par Stearns mentionne la rencontre de Lama Nyeu[4] (gnyos chos kyi gzi brjid 1164-1224) qui lui donna l'ordination majeure ainsi que des instructions qui pourraient être relatives à la pratique de Vajravarāhī et la Mahāmudrā. Quand Kodrakpa pratiqua Vajravarāhī il finit par voir sa face. Un peu plus tard, il eut aussi une vision de Saraha qui lui inspira un superbe chant (n° 19 dans la série).

Dans le chant (n° 12), dont je présente ici une traduction française à partir du tibétain, le terme "réalité intime ou du Coeur" (T. snying po'i don S. hṛdayārtha) tombe, qui est emblématique des instructions venant d'Advayavajra. C'est un chant qui a pour but d'inspirer les destinataires à se tourner vers l'intérieur, vers la pratique spirituelle. Il est aussi poignant et radical que les chants des Kadampa.

Nous n'avons pas ou plus l'habitude de cette tonalité qui nous paraît rabat-joie, voire morbide et à fort relents "judéo-chrétiens". Il ne faut pas y lire une apologie de la mortification par des héros ascétiques. C'est une simple invitation à regarder au-delà ou au-deçà des apparences et pour cela il faut que notre appétit incessant de celles-ci soit apaisé au moins un instant. Ensuite, quand la réalité intime (S. hṛdayārtha) se révèle, il faut s'y accoutumer ou se familiariser avec comme dit Kodrakpa dans son chant.

Pour Kodrakpa ces instants pouvaient quelquefois durer 24 ans (Stearns p. 10) et il était capable de survivre qu'avec de l'eau fraîche indiquée par une femme nāga locale, mais ce ne sont que des détails.

Voici le chant (pour une version annotée, cliquez sur le lien indiqué plus bas)

Namo guru

(Ensuite, j'avais écrit ceci pour aider à réduire les velléités de ceux qui réifient les apparences existentielles et s'y attachent.)

Quand on appréhende une essence (S. ātma) dans les groupes d'appropriation (S. skandha)
On a beau adresser des prières aux dieux du monde
Ils ne pourront pas nous garder de l'inquiétude existentielle
Dévouez-vous plutôt aux trois joyaux divins

Si l'on ne considère pas tous les autres comme des parents
On a beau prendre soin de trois fonctionnaires et de quatre amis
Ce ne sera pas en accord avec la pratique spirituelle
Dévouez-vous dans ce cas plutôt à un guide et à des condisciples

Si l'on ne sait pas être heureux quand on est seul
Etre en société nous causera de la distraction
Et les propos confus et les passions perturberont la conscience
Restez plutôt vigilants (S. apramāda) dans un endroit solitaire

Quand on n'a pas su développer le contentement
Les possessions (S. bhoga) et les fréquentations (S. saṃsarga) nous ferons tourner en rond
Même quand on est prospère on n'est pas obligé de toujours consommer
Préservez-vous plutôt de vous attacher aux biens matériels

Quand on ne connaît pas le principe fondamental (S. tathātva) de façon définitive
On a beau se consacrer au bien d'autrui avec une connaissance livresque
Ce ne sera toujours qu'un ignare qui en guide un autre
Familiarisez-vous plutôt avec la réalité intime (S. hṛdayārtha)

Si le progrès spirituel fait défaut
On a beau avoir un comportement et des actions conformes
Ce n'est pas cela qui fera surgir les signes d'une bonne pratique
Agissez plutôt conformément à vous-même

Notre époque est celle des cinq dégénérescences
Les hommes n'agissent pas conformément à leurs règles de vie
Ne vous laissez pas influencer par les rumeurs (T. ya kha), les exagérations et les dépréciations
Intégrez les plutôt dans votre propre pratique spirituelle

Les désirs des gens sont sans fin
Il est impossible de les satisfaire tous
Il vaut mieux ne pas penser aux défauts des autres
Ou mieux encore de se préserver de ses propres ruminations

Même si on est doué dans son travail
Si la mort arrivera demain ou après-demain
On ne pourra pas emporter cette expertise avec soi
C'est maintenant que la mort se prépare (T. 'chi chos)

Les caractéristiques des gratifications sensorielles procurent un plaisir à l'instant
Tandis que l'aboutissement (S. vipāka) inéluctable [de la poursuite continue de plaisirs instantanés successifs] est invisible
Quand la confiance en l'instruction capitale de cette inéluctabilité est faible
Nos pieds sont déjà tournés dans la direction du malheur (S. durgati)

Ceux qui ne s'appuient pas sur un guide dans un endroit solitaire
Parce qu'ils préfèrent leur région et leur yack
Seront plus enclins à se familiariser avec des passions aveuglantes
Et finiront alors par être tout couvert d'empreintes (S. vāsanā) néfastes

Que ceux qui me sont dévoués et qui me respectent
Réfléchissent bien à cela.

(Fin des propos de Rinpoché. Je m'incline devant les pieds du Seigneur.)

***

Une version PDF bilingue (police tibétaine) annotée peut être téléchargée ici.


[1] Roerich p. 727
[2] Plus précisément de la branche féminine (mo rgyud) de cette tradition, dont la fondatrice était Machik shama (ma gcig zha ma 1062-1149), disciple de rma lotsāwa (rma ban chos 'bar S. Dharmajvāla 1044-1089), traducteur de plusieurs textes de la main d'Advayavajra
[3] Stearns, p. 3
[4] Détenteur à la fois des instructions de la branche féminine de la tradition Zha ma et de la lignée Drikhung par son maître Jikten Geunpo ('jig rten mgon po 1143-1217). L'hagiographie est celle composée par shes rab mgon, qui appartient à la lignée Drukpa Kagyu et qui avait étudié avec des disciples de Yangeunpa (rgyal ba yang dgon pa
1213–1258) qui était un des disciples principaux de Kodrakpa. L'hagiographie qui a pour titre Chos rje ko brag pa'i rnam thar fait justement partie de l'oevre complet de Yangeunpa. Stearns p. 23, note 16

Texte tibétain Wylie (basé sur Stearns p. 86 et 88)

na mo gu ru/

yang de'i rjes ma tshe 'di'i snang ba la mngon par zhen cing bcags pa rnams blo sna bstung ba'i phyir 'di bris so/

phung po'i bdag 'dzin ma spongs pas//
lo ka'i lha la gsol btab kyang*//
'khor ba'i du kha mi skyob kyis//
lha dkon mchog gsum la mos gus gyis//

thams cad pha mar ma shes na//
drung gsum dang gnyen gzhi b.skyangs lags kyang*//
chos dang 'thun par mi 'gyur gyis//
bla ma dang mched la gus par gyis//

rang cig pur bde bar ma shes na//
mi tshogs mag po'i g.yeng ba'i rgyu//
'khrul gtam dang nyon mongs sems la gnod//
dben pa'i gnas su bag yod spyod//

chog shes nang nas ma skyes na//
longs spyod dang 'du 'dzi 'khor ba'i rgyu//
phyug kyang rtag du mi spyod kyis//
zang zing gi nor la zhen pa bskyungs//

gnas lugs la nges shes ma skyes na//
tshig shes gyis gzhan don 'bad byas kyang*//
blon pos blun po mi 'grongs kyis//
snying po'i don la gom 'dris gyis//

rgyud tshod mtho ru ma song na//
tshul dang spyod pa bzang bcos kyang*//
bzang rtags kyi yon tan mi 'char gyis//
de bas rang re'i spyod pa gyis//

ding sang snyigs ma lnga bdo'i dus//
mi rnams lta spyod mi mthun pas//
ya kha dang sgro skur mi khyegs kyis//
rang gi chos 'thun lam du khyer//

sems can gyi 'dod pa ma zad pas//
thams cad mgu bar mi nus gyis//
pha rol gyi skyon la ma rtog pas//
de bas rang re sems khral bskyungs//

tshe 'di'i sog tshis mkhas gyur kyang*//
sang nang bar 'chi ba'i dus byung na//
tshis mkhas la bsdus du mi bdog gis//
da lta rang nas 'chi chos mdzod//

'dod yon gyis mtshan nyid 'phral du bde//
myong nges kyi rnam smin lkog tu gyur//
slu med kyi bka' la yid ches gzhan//
ngan song rdog sna dred par mchi'o//

bla ma dang dgon pa ma sten par//
pha yul la gyag chags byed pa tsho//
'khrul pa'i nyon mongs 'dris pa sla//
bag chags ngan pas gos par mchi'o//

bdag la dad cing gus pa rnams//
don de legs par sems la zhog/

rin po che'i gsung*/ rje'i zhabs la 'dud//

vendredi 10 décembre 2010

Vers autobiographiques de Géshé Chékawa



J'ai quitté mon pays et mes proches
J'ai pratiqué la vertu de façon désintéressé
Dans la résidence de mon instructeur
J'ai pratiqué l'étude, la réflexion et la méditation avec vertu
Aussi, si je devais mourir maintenant, je n'aurai pas de regret

Je n'ai pas vénéré mes proches comme des dieux
J'ai porté des habits ordinaires et gardé un profil bas
Quelques soient mes compagnons, je n'ai jamais montré de déception
Je n'ai recherché ni renommée, ni fortune
Aussi, si je devais mourir maintenant, je n'aurai pas de regret

Je n'ai pas pris part aux coutumes et protocoles séculières ou religieuses
Je n'ai pas traité les bienfaiteurs comme des dieux
J'ai décliné l'hospitalité des religieuses
J'ai suivi l'exemple d'un grand saint (S. mahāṛṣi )
Aussi, si je devais mourir maintenant, je n'aurai pas de regret

Ceux qui possèdent beauté et richesses
Je ne les ai jamais flattés
Je n'ai pas vécu de prêts ni de commerce
Je n'ai pas construit de maisons, ni tenu de monastère
Aussi, si je devais mourir maintenant, je n'aurai pas de regret

Après avoir dit ces paroles, il est décédé.

***

[1] Deb ther sngon po (Chendu) pages 336-337 Blue Annals page 275

Géshé Chékawa ('chad kha ba ye shes rdo rje 1102–1176) est l'auteur de l'entraînement de l'esprit en sept points (T. blo sbyong don bdun ma), une instruction spécialement conçue pour des périodes difficiles (S. kaliyuga).

Voici la conclusion de son texte :
Au temps de l'âge de cinq dégénérescences
Voici le moyen de les transformer en la voie de la bodhi.
Voici l'essence du nectar des instructions orales
Transmises depuis la tradition du sage de Suvarnadvipa.

Ayant réveillé le karma d'un entraînement ancien,
Pressé par mon intense dévouement,
J'ai dédaigné malheur et calomnie,
J'ai reçu l'instruction orale qui dompte la fixation du moi.
Maintenant, même à l'heure de ma mort, je n'aurai pas de regrets.
- L'entraînement de l'esprit, Seuil Sagesses, p. 197 (avec quelques petites modifications)

Texte tibétain en Wylie

Rang gi rnam thar rnams tshigs su bcad de/
Yul dang bshes gnyen rab spangs te/
‘dzin chags med pa’i gde rtsa byas/
Bshes gnyen bzhugs pa’i sa phyogs su/
Thos bsam sgom gsum gde rtsa byas/
Da ni shi yang mi ‘gyod do/
Lha ru nye du ma mchod cing/
Hrul po’i gos gyon dman sa bzung/
Su dan ‘grogs kyang yid ma phyung/
Grags pa ma bsgrubs nor ma bsags/
Da ni shi yang mi ‘gyod do/
Mi chos lha chos ris srid dang/
Yon bdag lha bzhin mchod pa dang/
Ban mo’i bsnyen bkur rnams spangs te/
Drang srong chen po’i rnam thar spyad/
Da ni shi yang mi ‘gyod do/
Byad bzhin can dang nor can la/
Tsogs sogs bnyen bkur ma byas shing/
Bun skyed ma byas tshong ma byas/
Mkhar las ma byas gzhi ma gzung/
Da ni shi yang mi ‘gyod do/

Shes pa la sogs pa gsungs nas gshegs so/